La vie d'une princesse (suite) Suite de l'histoire

helena potocka

Helena Potocka en 1808, par Elisabeth Vigée Le Brun, Musée national Varsovie

Naissance de Sidonie – Vienne

Au fur et à mesure que le temps passe, les liens unissant les époux se relâchaient. Une liaison de Charles avec une pensionnaire de la Comédie-Française, Marie Bernardy apporta une diversion. Une fille Christine naquit de cette liaison le 4 janvier 1786.
Cependant la naissance de Sidonie le 8 septembre 1786 rapprocha les époux pour quelque temps. Ils retournèrent à Beloeil.
Hélas une insurrection éclate en 1787 en Flandres et la famille de Ligne, effrayée par l’agitation, rejoint le prince Charles à Vienne. Helena eut préféré passer l’hiver dans son hôtel à Paris, mais elle n’osa pas le demander à Charles que son service retenait à Vienne.
La cour de Joseph II d’Autriche n’était pas aussi brillante que celle de Versailles, mais on y rencontrait des personnages intéressants, de Hongrie, de Pologne,...
C’est dans l’appartement de la princesse Kinsky dans le palais du Belvédère supérieur qu’Helena rencontra la société la plus choisie de Vienne. On y rencontrait les princesses de Lichtenstein, soeurs de la belle-mère d’Helena, le duc de Bragance, le prince de Kaunitz, ... et l’empereur Joseph II.
Les bals de Vienne étaient renommés et Helena y excellait. A l’Opéra, elle assista à la première de Don Juan de Mozart.

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Mozart et Joseph II d'Autriche

Comme on le voit un hiver à Vienne pouvait se passer d’une manière très agréable, mais cette société ne plaisait pas à Helena. Elle regrettait Paris. Son mari, en revanche, qui connaissait depuis son enfance toutes les familles de la cour s’y trouvait à l’aise. Il était très lié avec toutes les jeunes femmes, amies de ses soeurs, en particulier avec la princesse Kinski.
La situation en Flandres ne s’arrangeait pas, il n’était donc pas question de retourner à Beloeil. Le prince Charles rappelé par le général de Lascy avait quitté Vienne.

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Le Palais du Belvédère supérieur à Vienne

Varsovie

Helena demande l’autorisation de se rendre auprès de son oncle à Varsovie sous le prétexte de régler d’importantes affaires. L’autorisation fut accordée à la condition de laisser la petite Sidonie au soins de sa grand-mère.
En septembre 1788, Helena quitte Vienne. Elle avait 25 ans, son mari en avait 29 et sa fille 2 ans.

Stanislas

Stanislas II Auguste Poniatowski

A Varsovie régnait Stanislas II Auguste Poniatowski, il a été élu roi avec l’appui de Catherine II de Russie. L’entourage du roi était très féminin, on y rencontrait les princesses Lubomirska, Czartoriska, Potocka, Poniatowska,...La princesse Helena de Ligne arriva dans cette cour précédée de sa réputation d’esprit, de beauté et de coquetterie. Son palais devint rapidement un des plus élégants de Varsovie. Elle oublia le passé, son mari et sa fille.

Varsovie
Potocki
Potocki

Le palais Potocki à Varsovie

Vincent Potocki

Parmi les personnages que l’on remarquait le plus, figurait le comte Vincent Potocki, Grand Chambellan. Il appartenait à une des familles les plus illustres de Pologne, qui possédait des terres immenses et des palais d’un luxe royal.
Son père Stanislas Potocky était le neveu et filleul de Stanislas Leszczynski, roi de Pologne de 1704 à 1709, puis de 1733 à 1736, sa fille Marie Leszczynka épousera Louis XV en 1725. Le père de Vincent est donc un cousin-germain de la reine de France.

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Marie Leszczynka, reine de France, épouse de Louis XV

Vincent Potocki, âgé de 38 ans, passait pour l’un des hommes les plus séduisants de la cour. Il avait épousé en première noce Ursule Zamoyska, nièce du roi Stanislas-Auguste. Ils n’eurent pas d’enfants et divorcèrent au bout de quelques années. Les divorces étaient choses fréquentes en Pologne. En 1786, Vincent se remaria avec la comtesse Mycielska qui lui donna deux fils. C’est au moment de la naissance du second fils que le comte fut appelé par ses fonctions à la cour de Varsovie. La comtesse dut rester en Ukraine dans les terres de Niemirow qui était leur résidence habituelle, sa santé ne lui permettant pas de voyager.
A peine arrivé à Varsovie, le grand chambellan rencontra Helena chez Mesdames Jean et Severin Potocka, ses cousines. Il devint bientôt un fidèle habitué de sa petite cour. On s’aperçut bientôt qu’elle accueillait le comte Vincent avec une faveur marquée. Elle changea ses habitudes et on ne la vit plus que dans les salons que le comte fréquentait aussi. Celui-ci restait réservé, mais était flatté de l’intérêt de la jeune femme. Helena de son côté tombe vraiment amoureuse pour la première fois. Plusieurs mois s’écoulent. Le comte accepte de prendre la responsabilité de prendre la direction des affaires fort embrouillées d’Helena. De nombreux entretiens eurent lieu toujours en présence d’un tiers, secrétaire ou demoiselle. Un jour, le comte demande un entretien en particulier. Au cours de cette rencontre le comte lui avoue ses sentiments et la princesse lui avoue son amour. Mais Helena lui précise qu’il ne devait rien espérer de plus tant qu’ils n’auraient pas l’un et l’autre reconquis leur liberté.

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Vincent Potocki

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Le château de Niemirow

Demande de divorce

A la fin de 1790, rétablie, la comtesse Anna Potocki revint rejoindre son mari à Varsovie. Elle adorait son mari et découvrit bien vite les liens qui l’unissaient à Helena. Elle refusa de recevoir Helena. Déchiré entre les deux femmes, Vincent décida de quitter Varsovie pour rejoindre Niemirow. Apprenant cela, Helena quitte Varsovie à la poursuite de Vincent et arrive à Niemirow quelques heures après lui. Troublé par cette réaction, un acte insensé à l’époque qui peut ruiner une réputation, le comte accueille Helena et après explications, ils décident de demander immédiatement le divorce chacun de leur côté. Le lendemain trois lettres partent : la première pour la comtesse Anna, la deuxième pour le prince de Ligne et la dernière pour le prince évêque de Vilnius. Le comte proposait à sa femme Anna de lui rendre ses deux fils en échange du consentement au divorce et lui offrait en outre une pension considérable. La princesse demandait sa fille Sidonie, et à son oncle elle demandait de l’aide pour régler ses affaires.
La réponse de la comtesse Anna, épouse de Vincent depuis 4 ans seulement fut simple: elle demandait le retour de Vincent auprès d’elle.
Pendant ce temps, le prince Charles, mari d’Helena se battait contre les Turcs, au service de la Russie. Son courage fut remarqué et Catherine II de Russie le nomma colonel et lui décerna la croix de commandeur de l’ordre de Saint-Georges. A Vienne, il retrouve son père et sa famille. La famille de Ligne était gravement offensée par l’attitude leur belle-fille. Ils refusèrent nettement la demande de divorce : « Comme nous ne savons plus si la princesse Charles de Ligne existe, nous ne pouvons faire aucun arrangement avec elle. »
En 1790, les de Ligne retournent à Beloeil, toutes traces de troubles avait disparu des Flandres.
Vincent se rend à Paris pour essayer de négocier avec les de Ligne, en vain.
Pendant ce temps Helena vivait à Niemirov, dans une profonde retraite. L’argent commençait à manquer, son oncle retardait la transmission de l’héritage. De retour en Pologne, Vincent tardait à venir en Ukraine.Puis après plusieurs mois, il arriva enfin près d’Helena, mécontent car il n’avait rien obtenu.

Mort du prince de Ligne

En 1792, le prince Charles sollicitait sa rentrée dans l’armée autrichienne avec le grade de colonel. La campagne était commencée contre les armées de la République française. Le 27 mai, Charles se signala par une bravoure audacieuse dans un combat près de Condé, mais aucune grande bataille ne se préparait. Plusieurs mois se passent, puis le 13 septembre, on confie à Charles l’attaque du passage de la Croix-au-Bois. La bataille fut vive, six fois le poste est repris par les Français et repris par les Autrichiens. Le prince Charles voit que pour se rendre maître de la position, il faut prendre une batterie de canons française. Le prince commande lui-même l’assaut, huit de ses hommes sont tués immédiatement et lui-même reçoit un boulet à la tête et tombe foudroyé. Il avait 34 ans. Son père, qui était à Vienne, ne se consola pas du décès de son fils. Il perdit tout le plaisir qu’il avait à vivre.
La victoire des Français empêcha une fois de plus la famille de Ligne de rentrer à Beloeil.
Avant de mourir, Charles avait fait son testament. On y trouve au point VI:  « Je lègue à ma fille Sidonie le portrait de sa mère, afin qu’elle se ressouvienne de ne pas l’imiter, et mon sabre turc donné par le prince Potemkine, qu’elle doit toujours avoir dans sa chambre pour faire savoir à ses enfants que mon intention est qu’ils soient tous militaires »
Au point XVI « On aura bien soin d’ôter (de Beloeil) le portrait de ma femme qu’on mettra au garde-meuble. »

Actuellement, le portrait n'est plus au garde - meuble, mais exposé dans une galerie du château (voir ci-dessous)

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Quand Helena apprend la mort de son mari, elle écrit au comte Vincent: « Un boulet vient d’emporter le prince Charles, je suis libre, c’est la volonté divine : ce canon était chargé depuis l’éternité ». Peu de temps après,le second fils de la comtesse Anna succombe à une maladie et enfin Helena apprend la mort de son frère Xavier, ce qui la faisait héritière unique de 600'000 livres de rente.
De retour à Niemirov, Vincent renouvelle sa demande de divorce auprès de la comtesse Anna, en échange de son fils François. La pauvre comtesse accepta à condition que tout fut fait dans les règles. C’est-à-dire qu’il fallait obtenir le consentement de Rome. Anna savait que cela exigeait de longs délais et elle espérait que son mari reviendrait à elle durant ce temps. De son côté Helena écrivit à son oncle, elle lui annonçait la mort de son mari et lui demandait son aide pour régler à la liquidation des affaires de son frère Xavier. Le prince évêque, calculant rapidement que le comte Vincent Potocki vivant lui serait plus utile que le prince Charles de Ligne mort, invita le comte Potocki à venir à Varsovie pour régler les affaires. Dans la même lettre, il invite Helena à Werki en Lituanie.

Suite de l'histoire

 

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