Les Grisons :
La tour de Boggiano

 

Contrairement aux autres châteaux féodaux du val Mesolcina, qui tous se trouvent à proximité d'une agglomération, les restes de la torre Boggiano se dressent sur un promontoire rocheux haut au-dessus de Roveredo, donc loin de tout lieu habité. Il ne subsiste de l'ouvrage défensif d'antan que quelques rares vestiges. Venant du sud, on atteint l'intérieur de la vaste place du château après avoir suivi un sentier abrupt, taillé par endroits dans le rocher. Seules quelques traces de murs rappellent l'enceinte qui autrefois devait encercler tout le plateau rocheux et la porte qui donnait accès à la forteresse. Au nord-est, du côté de la vallée, une traverse empêchait toute approche ennemie. A l'angle sud-est de la ceinture, juste derrière l'entrée, s'élèvent les ruines d'une tour carrée. Ce monument était encore intact au début du XXe siècle, mais entre-temps, son côté sud s'est écroulé. Fort heureusement, des travaux de consolidation ont permis de sauver d'un délabrement complet au moins la partie nord. La surface de base de la tour est trop petite pour qu'on puisse admettre que cette dernière ait servi en permanence d'habitation. L'intérieur était éclairé par d'étroites meurtrières. Une photographie de 1895 montre que la façade sud, donc celle qui a disparu, était percée d'une meurtrière ronde permettant le service d'armes à feu de petit calibre. La tour était couronnée de créneaux et coiffée d'un toit en bâtière. Les bâtiments d'habitation avaient sans doute été construits en bois ou en maçonnerie à sec; c'est pourquoi on n'en trouve pas la moindre trace à l'intérieur de l'ouvrage.

Le nom de Boggiano a été transmis par des chroniqueurs rhétiques du XVIe siècle. Mais aucun document ne fait mention de la forteresse et on ne possède non plus aucune indication quant à une famille noble qui aurait porté le nom de Boggiano. La vaste vue dont on jouit de la colline, s'étendant à toute la partie inférieure de la vallée, a souvent porté à croire que l'ouvrage de Boggiano était une tour de guet d'où les seigneurs de Sax, maîtres du val Mesolcina, faisaient surveiller la région en temps de guerre. D'un point de vue scientifique plus moderne, cette interprétation ne peut toutefois plus être admise. La situation isolée du château, à l'entrée de la vallée sauvage de Traversagna, semble plutôt indiquer qu'il a dû s'agir d'un ouvrage d'essartage construit au haut Moyen Age, lorsque la région se développa. Seules des recherches archéologiques pourraient fournir de plus amples renseignements sur l'époque à laquelle la torre Boggiano a vu le jour. Les bâtisseurs sont eux aussi inconnus; on peut uniquement supposer qu'à la fin du Moyen Age, la forteresse appartenait aux comtes de Sax-Misox et qu'elle fut restaurée et agrandie par Albert de Sax vers 1400, lorsque celui-ci étendit sa souveraineté territoriale au-delà du col de San Jorio. La meurtrière citée plus haut et maintenant disparue nous porte à croire que l'ouvrage a été occupé jusqu'au début du XVe siècle, mais que, comme d'autres forteresses de la maison de Sax il a été abandonné avant 1500. Après la perte du Monte Dongo, conquis par Milan avant 1450, les Sax perdirent sans doute tout intérêt à la torre Boggiano.

Bibliographie

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